ATELIER PHILO EN PRISON : POURQUOI VOULONS-NOUS EXISTER ?
Il arrive souvent en prison (et là comme ailleurs) que les participants aux ateliers se précipitent pour prendre la parole poussés par une sorte d'urgence. Or la pratique philosophique invite à prendre conscience de cette urgence, à en examiner les causes et les conséquences.
Ce jour-là donc nous réfléchissons à partir de cette histoire qu’on raconte à propos de Socrate.
Un jour une personne vint le trouver avec beaucoup de précipitation pour lui parler. Sans céder à l’urgence le philosophe lui demanda, s’il avait fait passer sa parole par l’épreuve des trois tamis : avait-il vérifié la véracité de ses propos ? Était-il bon de dire ce qu’il voulait dire ? Et enfin cela était-il utile ? Comme ce qu’il avait à dire ne passait par aucun de ces critères, Socrate lui suggéra donc de ne rien dire.
Je questionne alors les participants à l'atelier :
- Pourquoi nous arrive-t-il de dire des choses alors que nous ne savons pas si elles sont vraies ? Alors que parfois même nous savons qu’elles sont fausses et mauvaises ?
- C’est parce que nous voulons exister répond Abdou, car même si nous ne les avons pas vérifiées, nous avons que tout le monde va écouter ces paroles et nous porter attention.
- Mais pourquoi tenons-nous tant à exister ?
- Parce que nous avons peur d’être oublié et d’être mis à l’écart propose Thierry. Dans l’histoire le personnage pense qu’en étant écouté par un philosophe important comme Socrate, il deviendra lui-même important.
- Pourquoi veut-on être important ?
- Parce que nous avons peur de n’être rien.
- Donc nous voulons exister parce que nous avons peur : d’être oublié et de n’être rien. Mais qu’est-ce que cela a comme conséquences ?
- Lorsque nous ne faisons pas passer notre parole par ces trois tamis, nous semons le chaos autour de nous, précise Sébastien.
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